LesCaractÚres de La BruyÚre, analyse d'une forme moraliste. AprÚs avoir esquissé quelques pistes de réflexion, dont une analyse du thÚme du pouvoir, nous proposerons quelques exercices de préparation aux épreuves du bac. Ainsi, le moraliste donne à voir les artifices et le ridicule humain. . littérature d'idées.

II Un caractĂšre bien fade est celui de n’en avoir C’est le rĂŽle d’un sot d’ĂȘtre importun un homme habile sent s’il convient ou s’il ennuie ; il sait disparaĂźtre le moment qui prĂ©cĂšde celui oĂč il serait de trop quelque marche sur les mauvais plaisants, et il pleut par tout pays de cette sorte d’insectes. Un bon plaisant est une piĂšce rare ; Ă  un homme qui est nĂ© tel, il est encore fort dĂ©licat d’en soutenir longtemps le personnage ; il n’est pas ordinaire que celui qui fait rire se fasse Il a beaucoup d’esprits obscĂšnes, encore plus de mĂ©disants ou de satiriques, peu de dĂ©licats. Pour badiner avec grĂące, et rencontrer heureusement sur les plus petits sujets, il faut trop de maniĂšres, trop de politesse, et mĂȘme trop de fĂ©conditĂ© c’est crĂ©er que de railler ainsi, et faire quelque chose de Si l’on faisait une sĂ©rieuse attention Ă  tout ce qui se dit de froid, de vain de puĂ©ril dans les entretiens ordinaires, l’on aurait honte de parler ou d’écouter, et l’on se condamnerait peut-ĂȘtre Ă  un silence perpĂ©tuel, qui serait une chose pire dans le commerce que les discours inutiles. Il faut donc s’accommoder Ă  tous les esprits, permettre comme un mal nĂ©cessaire le rĂ©cit des fausses nouvelles, les vagues rĂ©flexions sur le gouvernement prĂ©sent, ou sur l’intĂ©rĂȘt des princes, le dĂ©bit des beaux sentiments, et qui reviennent toujours les mĂȘmes ; il faut laisser Aronce parler proverbe, et MĂ©linde parler de soi, de ses vapeurs, de ses migraines et de ses L’on voit des gens qui, dans les conversations ou dans le peu de commerce que l’on a avec eux, vous dĂ©goĂ»tent par leurs ridicules expressions, par la nouveautĂ©, et j’ose dire par l’impropriĂ©tĂ© des termes dont ils se servent, comme par l’alliance de certains mots qui ne se rencontrent ensemble que dans leur bouche, et Ă  qui ils font signifier des choses que leurs premiers inventeurs n’ont jamais eu intention de leur faire dire. Ils ne suivent en parlant ni la raison ni l’usage, mais leur bizarre gĂ©nie, que l’envie de toujours plaisanter, et peut-ĂȘtre de briller, tourne insensiblement Ă  un jargon qui leur est propre, et qui devient enfin leur idiome naturel ; ils accompagnent un langage si extravagant d’un geste affectĂ© et d’une prononciation qui est contrefaite. Tous sont contents d’eux-mĂȘmes et de l’agrĂ©ment de leur esprit, et l’on ne peut pas dire qu’ils en soient entiĂšrement dĂ©nuĂ©s ; mais on les plaint de ce peu qu’ils en ont ; et ce qui est pire, on en Que dites-vous ? Comment ? Je n’y suis pas ; vous plairait-il de recommencer ? J’y suis encore moins. Je devine enfin vous voulez, Acis, me dire qu’il fait froid ; que ne disiez-vous "Il fait froid" ? Vous voulez m’apprendre qu’il pleut ou qu’il neige ; dites "Il pleut, il neige." Vous me trouvez bon visage, et vous dĂ©sirez de m’en fĂ©liciter ; dites "Je vous trouve bon visage."— Mais, rĂ©pondez-vous, cela est bien uni et bien clair ; et d’ailleurs qui ne pourrait pas en dire autant ? — Qu’importe, Acis ? Est-ce un si grand mal d’ĂȘtre entendu quand on parle, et de parler comme tout le monde ? Une chose vous manque, Acis, Ă  vous et Ă  vos semblables les diseurs de phobus ; vous ne vous en dĂ©fiez point, et je vais vous jeter dans l’étonnement une chose vous manque, c’est l’esprit. Ce n’est pas tout il y a en vous une chose de trop, qui est l’opinion d’en avoir plus que les autres ; voilĂ  la source de votre pompeux galimatias, de vos phrases embrouillĂ©es, et de vos grands mots qui ne signifient rien. Vous abordez cet homme, ou vous entrez dans cette chambre ; je vous tire par votre habit, et vous dis Ă  l’oreille "Ne songez point Ă  avoir de l’esprit, n’en ayez point, c’est votre rĂŽle ; ayez, si vous pouvez, un langage simple, et tel que l’ont ceux en qui vous ne trouvez aucun esprit peut-ĂȘtre alors croira-t-on que vous en avez."8IV Qui peut se promettre d’éviter dans la sociĂ©tĂ© des hommes la rencontre de certains esprits vains, lĂ©gers, familiers, dĂ©libĂ©rĂ©s, qui sont toujours dans une compagnie ceux qui parlent, et qu’il faut que les autres Ă©coutent ? On les entend de l’antichambre ; on entre impunĂ©ment et sans crains de les interrompre ils continuent leur rĂ©cit sans la moindre attention pour ceux qui entrent ou qui sortent, comme pour le rang le mĂ©rite des personnes qui composent le cercle ; ils font taire celui qui commence Ă  conter une nouvelle, pour la dire de leur façon, qui est la meilleure ils la tiennent de Zamet, de Ruccelay, ou de Conchini, qu’ils ne connaissent point, Ă  qui ils n’ont jamais parlĂ©, et qu’ils traiteraient de Monseigneur s’ils leur parlaient ; ils s’approchent quelquefois de l’oreille du plus qualifiĂ© de l’assemblĂ©e, pour le gratifier d’une circonstance que personne ne sait, et dont ils ne veulent pas que les autres soient instruits ; ils suppriment quelques noms pour dĂ©guiser l’histoire qu’ils racontent, et pour dĂ©tourner les applications ; vous les priez les pressez inutilement il y a des choses qu’ils ne diront pas, il y a des gens qu’ils ne sauraient nommer, leur parole y est engagĂ©e, c’est le dernier secret, c’est un mystĂšre, outre que vous leur demandez l’impossible, car sur ce que vous voulez apprendre d’eux, ils ignorent le fait et les Arrias a tout lu, a tout vu, il veut le persuader ainsi ; c’est un homme universel, et il se donne pour tel il aime mieux mentir que de se taire ou de paraĂźtre ignorer quelque chose. On parle Ă  la table d’un grand d’une cour du Nord il prend la parole, et l’îte Ă  ceux qui allaient dire ce qu’ils en savent ; il s’oriente dans cette rĂ©gion lointaine comme s’il en Ă©tait originaire ; il discourt des mƓurs de cette cour, des femmes du pays, des ses lois et de ses coutumes ; il rĂ©cite des historiettes qui y sont arrivĂ©es ; il les trouve plaisantes, et il en rit le premier jusqu’à Ă©clater. Quelqu’un se hasarde de le contredire, et lui prouve nettement qu’il dit des choses qui ne sont pas vraies. Arrias ne se trouble point, prend feu au contraire contre l’interrupteur "Je n’avance, lui dit-il, je raconte rien que je ne sache d’original je l’ai appris de Sethon, ambassadeur de France dans cette cour, revenu Ă  Paris depuis quelques jours, que je connais familiĂšrement, que j’ai fort interrogĂ©, et qui ne m’a cachĂ© aucune circonstance." Il reprenait le fil de sa narration avec plus de confiance qu’il ne l’avait commencĂ©e, lorsque l’un des conviĂ©s lui dit "C’est Sethon Ă  qui vous parlez, lui-mĂȘme, et qui arrive de son ambassade."I0IV Il y a un parti Ă  prendre, dans les entretiens, entre une certaine paresse qu’on a de parler, ou quelquefois un esprit abstrait, qui, nous jetant loin du sujet de la conversation, nous fait faire ou de mauvaises demandes ou de sottes rĂ©ponses, et une attention importune qu’on a au moindre mot qui Ă©chappe, pour le relever, badiner autour, y trouver un mystĂšre que les autres n’y voient pas, y chercher de la finesse et de la subtilitĂ©, seulement pour avoir occasion d’y placer la Etre infatuĂ© de soi, et s’ĂȘtre fortement persuadĂ© qu’on a beaucoup d’esprit, est un accident qui n’arrive guĂšre qu’à celui qui n’en a point, ou qui en a peu. Malheur pour lors Ă  qui est exposĂ© Ă  l’entretien d’un tel personnage ! combien de jolies phrases lui faudra-t-il essuyer ! combien de ces mots aventuriers qui paraissent subitement, durent un temps, et que bientĂŽt on ne revoit plus ! S’il conte une nouvelle, c’est moins pour l’apprendre Ă  ceux qui l’écoutent, que pour avoir le mĂ©rite de la dire, et de la dire bien elle devient un roman entre ses mains ; il fait penser les gens Ă  sa maniĂšre, leur met en la bouche ses petites façons de parler, et les fait toujours parler longtemps ; il tombe ensuite en des parenthĂšses, qui peuvent passer pour Ă©pisodes, mais qui font oublier le gros de l’histoire, et Ă  lui qui vous parle, et Ă  vous qui le supportez. Que serait-ce de vous et de lui, si quelqu’un ne survenait heureusement pour dĂ©ranger le cercle, et faire oublier la narration ?I2V J’entends ThĂ©odecte de l’antichambre ; il grossit sa voix Ă  mesure qu’il s’approche ; le voilĂ  entrĂ© il rit, il crie, il Ă©clate ; on bouche ses oreilles, c’est un tonnerre. Il n’est pas moins redoutable par les choses qu’il dit que par le ton dont il parle. Il ne s’apaise, et il ne revient de ce grand fracas que pour bredouiller des vanitĂ©s et des sottises. Il a si peu d’égard au temps, aux personnes, aux biensĂ©ances, que chacun a son fait sans qu’il ait eu intention de le lui donner ; il n’est pas encore assis qu’il a, Ă  son insu, dĂ©sobligĂ© toute l’assemblĂ©e. A-t-on servi, il se met le premier Ă  table et dans la premiĂšre place ; les femmes sont Ă  sa droite et Ă  gauche. Il mange, il boit, il conte, il plaisante, il interrompt tout Ă  la fois. Il n’a nul discernement des personnes, ni du maĂźtre, ni des conviĂ©s ; il abuse de la folle dĂ©fĂ©rence qu’on a pour lui. Est-ce lui, est-ce EuthydĂšme qui donne le repas ? Il rappelle Ă  soi toute l’autoritĂ© de la table ; et il y a un moindre inconvĂ©nient Ă  la lui laisser entiĂšre qu’à la lui disputer. Le vin et les viandes n’ajoutent rien Ă  son caractĂšre. Si l’on joue, il gagne au jeu ; il veut railler celui qui perd, et il l’offense ; les rieurs sont pour lui il n’y a sorte de fatuitĂ©s qu’on ne lui passe. Je cĂšde enfin et je disparais, incapable de souffrir plus longtemps ThĂ©odecte, et ceux qui le TroĂŻle est utile Ă  ceux qui ont trop de bien il leur ĂŽte l’embarras du superflu ; il leur sauve la peine d’amasser de l’argent, de faire des contrats, de fermer des coffres, de porter des clefs sur soi et de craindre un vol domestique. Il les aide dans leurs plaisirs, et il devient capable ensuite de les servir dans leurs passions ; bientĂŽt il les rĂšgle et les maĂźtrise dans leur conduite. Il est l’oracle d’une maison, celui dont on attend, que dis-je ? dont on prĂ©vient, dont on devine les dĂ©cisions. Il dit de cet esclave "Il faut le punir", et on le fouette ; et de cet autre "Il faut l’affranchir", et on l’affranchit. L’on voit qu’un parasite ne le fait pas rire ; il peut lui dĂ©plaire il est congĂ©diĂ©. Le maĂźtre est heureux, si TroĂŻle lui laisse sa femme et ses enfants. Si celui-ci est Ă  table, et qu’il prononce d’un mets qu’il est friand, le maĂźtre et les conviĂ©s, qui en mangeaient sans rĂ©flexion, le trouvent friand, et ne s’en peuvent rassasier ; s’il dit au contraire d’un autre mets qu’il est insipide, ceux qui commençaient Ă  le goĂ»ter, n’osant avaler le morceau qu’ils ont Ă  la bouche, ils le jettent Ă  terre tous ont les yeux sur lui, observent son maintien et son visage avant de prononcer sur le vin ou sur les viandes qui sont servies. Ne le cherchez pas ailleurs que dans la maison de ce riche qu’il gouverne c’est lĂ  qu’il mange, qu’il dort et qu’il fait digestion, qu’il querelle son valet, qu’il reçoit ses ouvriers, et qu’il remet ses crĂ©anciers. Il rĂ©gente, il domine dans une salle ; il y reçoit la cour et les hommages de ceux qui, plus fins que les autres, ne veulent aller au maĂźtre que par TroĂŻle. Si l’on entre par malheur sans avoir une physionomie qui lui agrĂ©e, il ride son front et il dĂ©tourne sa vue ; si on l’aborde, il ne se lĂšve pas ; si l’on s’assied auprĂšs de lui, il s’éloigne ; si on lui parle, il ne rĂ©pond point ; si l’on continue de parler, il passe dans une autre chambre ; si on le suit, il gagne l’escalier ; il franchirait tous les Ă©tages, ou il se lancerait par une fenĂȘtre, plutĂŽt que de se laisser joindre par quelqu’un qui a un visage ou un ton de voix qu’il dĂ©sapprouve. L’un et l’autre sont agrĂ©ables en TroĂŻle, et il s’en est servi heureusement pour s’insinuer ou pour conquĂ©rir. Tout devient, avec le temps, au-dessous de ses soins, comme il est au-dessus de vouloir se soutenir ou continuer de plaire par le moindre des talents qui ont commencĂ© Ă  le faire valoir. C’est beaucoup qu’il sorte quelquefois de ses mĂ©ditations et de sa taciturnitĂ© pour contredire, et que mĂȘme pour critiquer il daigne une fois le jour avoir de l’esprit. Bien loin d’attendre de lui qu’il dĂ©fĂšre Ă  vos sentiments, qu’il soit complaisant, qu’il vous loue, vous n’ĂȘtes pas sĂ»r qu’il aime toujours votre approbation, ou qu’il souffre votre Il faut laisser parler cet inconnu que le hasard a placĂ© auprĂšs de vous dans une voiture publique, Ă  une fĂȘte ou Ă  un spectacle ; et il ne vous coĂ»tera bientĂŽt pour le connaĂźtre que de l’avoir Ă©coutĂ© vous saurez son nom, sa demeure, son pays, l’état de son bien, son emploi, celui de son pĂšre, la famille dont est sa mĂšre, sa parentĂ©, ses alliances, les armes de sa maison ; vous comprendrez qu’il est noble, qu’il a un chĂąteau, de beaux meubles, des valets, et un Il y a des gens qui parlent un moment avant que d’avoir pensĂ©. Il y en a d’autres qui ont une fade attention Ă  ce qu’ils disent, et avec qui l’on souffre dans la conversation de tout le travail de leur esprit ; ils sont comme pĂ©tris de phrases et de petits tours d’expression, concertĂ©s dans leur geste et dans tout leur maintien ; ils sont puristes, et ne hasardent pas le moindre mot, quand il devrait faire le plus bel effet du monde ; rien d’heureux ne leur Ă©chappe, rien ne coule de source et avec libertĂ© ils parlent proprement et L’esprit de la conversation consiste bien moins Ă  en montrer beaucoup qu’à en faire trouver aux autres celui qui sort de votre entretien content de soi et de son esprit, l’est de vous parfaitement. Les hommes n’aiment point Ă  vous admirer, ils veulent plaire ; ils cherchent moins Ă  ĂȘtre instruits, et mĂȘme rĂ©jouis, qu’à ĂȘtre goĂ»tĂ©s et applaudis ; et le plaisir le plus dĂ©licat est de faire celui d’ Il ne faut pas qu’il y ait trop d’imagination dans nos conversations ni dans nos Ă©crits ; elle ne produit souvent que des idĂ©es vaines et puĂ©riles, qui ne servent point Ă  perfectionner le goĂ»t et Ă  nous rendre meilleurs nos pensĂ©es doivent ĂȘtre prises dans le bon sens et la droite raison, et doivent ĂȘtre un effet de notre C’est une grande misĂšre que de n’avoir pas assez d’esprit pour bien parler, ni assez de jugement pour se taire. VoilĂ  le principe de toute Dire d’une chose modestement ou qu’elle est bonne ou qu’elle est mauvaise, et les raisons pourquoi elle est telle, demande du bon sens et de l’expression c’est une affaire. Il est plus court de prononcer d’un ton dĂ©cisif, et qui emporte la preuve de ce qu’on avance, ou qu’elle est exĂ©crable, ou qu’elle est Rien n’est moins selon Dieu et selon le monde que d’appuyer tout ce que l’on dit dans la conversation, jusques aux choses les plus indiffĂ©rentes, par de longs et de fastidieux serments. Un honnĂȘte homme qui dit oui et non mĂ©rite d’ĂȘtre cru son caractĂšre jure pour lui, donne crĂ©ance Ă  ses paroles, et lui attire toute sorte de Celui qui dit incessamment qu’il a de l’honneur et de la probitĂ©, qu’il ne nuit Ă  personne, qu’il consent que le mal qu’il fait aux autres lui arrive, et qui jure pour le faire croire, ne sait pas mĂȘme contrefaire l’homme de homme de bien ne saurait empĂȘcher par toute sa modestie qu’on ne dise de lui ce qu’un malhonnĂȘte homme sait dire de ClĂ©on parle peu obligeamment ou peu juste, c’est l’un ou l’autre ; mais il ajoute qu’il est fait ainsi, et qu’il dit ce qu’il Il y a parler bien, parler aisĂ©ment, parler juste, parler Ă  propos. C’est pĂ©cher contre ce dernier genre que de s’étendre sur un repas magnifique que l’on vient de faire, devant des gens qui sont rĂ©duits Ă  Ă©pargner leur pain ; de dire merveilles de sa santĂ© devant des infirmes ; d’entretenir de ses richesses, de ses revenus et de ses ameublements un homme qui n’a ni rentes ni domicile ; en un mot, de parler de son bonheur devant des misĂ©rables cette conversation est trop forte pour eux, et la comparaison qu’ils font alors de leur Ă©tat au vĂŽtre est "Pour vous, dit Euthyphron, vous ĂȘtes riche, ou vous devez l’ĂȘtre dix mille livres de rente, et en fonds de terre, cela est beau, cela est doux, et l’on est heureux Ă  moins", pendant que lui qui parle ainsi a cinquante mille livres de revenu, et qu’il croit n’avoir que la moitiĂ© de ce qu’il mĂ©rite. Il vous taxe, il vous apprĂ©cie, il fixe votre dĂ©pense et s’il vous jugeait digne d’une meilleure fortune, et de celle mĂȘme oĂč il aspire, il ne manquerait pas de vous la souhaiter. Il n’est pas le seul qui fasse de si mauvaises estimations ou des comparaisons si dĂ©sobligeantes le monde est plein d’ Quelqu’un, suivant la pente de la coutume qui veut qu’on loue, et par l’habitude qu’il a Ă  la flatterie et Ă  l’exagĂ©ration, congratule ThĂ©odĂšme sur un discours qu’il n’a point entendu, et dont personne n’a pu encore lui rendre compte il ne laisse pas de lui parler de son gĂ©nie, de son geste, et surtout de la fidĂ©litĂ© de sa mĂ©moire ; et il est vrai que ThĂ©odĂšme est demeurĂ© IV L’on voit des gens brusques, inquiets, suffisants, qui bien qu’oisifs et sans aucune affaire qui les appelle ailleurs, vous expĂ©dient, pour ainsi dire, en peu de paroles, et ne songent qu’à se dĂ©gager de vous ; on leur parle encore, qu’ils sont partis et ont disparu. Ils ne sont pas moins impertinents que ceux qui vous arrĂȘtent seulement pour vous ennuyer ils sont peut-ĂȘtre moins Parler et offenser, pour de certaines gens, est prĂ©cisĂ©ment la mĂȘme chose. Ils sont piquants et amers ; leur style est mĂȘlĂ© de fiel et d’absinthe la raillerie, l’injure, l’insulte leur dĂ©coulent des lĂšvres comme leur salive. Il leur serait utile d’ĂȘtre nĂ©s muets ou stupides ce qu’ils ont de vivacitĂ© et d’esprit leur nuit davantage que ne fait Ă  quelques autres leur sottise. Ils ne se contentent pas toujours de rĂ©pliquer avec aigreur, ils attaquent souvent avec insolence ; ils frappent sur tout ce qui se trouve sous leur langue, sur les prĂ©sents, sur les absents ; ils heurtent de front et de cĂŽtĂ©, comme des bĂ©liers demande-t-on Ă  des bĂ©liers qu’ils n’aient pas de cornes ? De mĂȘme n’espĂšre-t-on pas de rĂ©former par cette peinture des naturels si durs, si farouches, si indociles. Ce que l’on peut faire de mieux, d’aussi loin qu’on les dĂ©couvre, est de les fuir de toute sa force et sans regarder derriĂšre Il y a des gens d’une certaine Ă©toffe ou d’un certain caractĂšre avec qui il ne faut jamais se commettre, de qui l’on ne doit se plaindre que le moins qu’il est possible, contre qui il n’est pas mĂȘme permis d’avoir Entre deux personnes qui ont eu ensemble une violente querelle, dont l’un a raison et l’autre ne l’a pas, ce que la plupart de ceux qui y ont assistĂ© ne manquent jamais de faire, ou pour se dispenser de juger, ou par un tempĂ©rament qui m’a toujours paru hors de sa place, c’est de condamner tous les deux leçon importante, motif pressant et indispensable de fuir Ă  l’orient quand le fat est Ă  l’occident, pour Ă©viter de partager avec lui le mĂȘme Je n’aime pas un homme que je ne puis aborder le premier, ni saluer avant qu’il me salue, sans m’avilir Ă  ses yeux, et sans tremper dans la bonne opinion qu’il a de lui-mĂȘme. Montaigne dirait Je veux avoir mes coudĂ©es franches, et estre courtois et affable Ă  mon point, sans remords ne consequence. Je ne puis du tout estriver contre mon penchant, et aller au rebours de mon naturel, qui m’emmeine vers celuy que je trouve Ă  ma rencontre. Quand il m’est Ă©gal, et qu’il ne m’est point ennemy, j’anticipe sur son accueil, je le questionne sur sa disposition et santĂ©, je luy fais offre de mes offices sans tant marchander sur le plus ou sur le moins, ne estre, comme disent aucuns, sur le qui vive. Celuy-lĂ  me deplaist, qui par la connoissance que j’ay de ses coutumes et façons d’agir, me tire de cette libertĂ© et franchise. Comment me ressouvenir tout Ă  propos, et d’aussi loin que je vois cet homme, d’emprunter une contenance grave et importante, et qui l’avertisse que je crois le valoir bien et au delĂ  ? pour cela de me ramentevoir de mes bonnes qualitez et conditions, et des siennes mauvaises, puis en faire la comparaison. C’est trop de travail pour moy, et ne suis du tout capable de si roide et si subite attention ; et quand bien elle m’auroit succedĂ© une premiĂšre fois, je ne laisserois de flechir et me dementir Ă  une seconde tĂąche je ne puis me forcer et contraindre pour quelconque Ă  estre fier."3IIV Avec de la vertu, de la capacitĂ©, et une bonne conduite, l’on peut ĂȘtre insupportable. Les maniĂšres, que l’on nĂ©glige comme de petites choses, sont souvent ce qui fait que les hommes dĂ©cident de vous en bien ou en mal une lĂ©gĂšre attention Ă  les avoir douces et polies prĂ©vient leurs mauvais jugements. Il ne faut presque rien pour ĂȘtre cru fier, incivil, mĂ©prisant, dĂ©sobligeant il faut encore moins pour ĂȘtre estimĂ© tout le La politesse n’inspire pas toujours la bontĂ©, l’équitĂ©, la complaisance, la gratitude ; elle en donne du moins les apparences, et fait paraĂźtre l’homme au dehors comme il devrait ĂȘtre intĂ©rieurement.I L’on peut dĂ©finir l’esprit de politesse, l’on ne peut en fixer la pratique elle suit l’usage et les coutumes reçues ; elle est attachĂ©e aux temps, aux lieux, aux personnes, et n’est point la mĂȘme dans les deux sexes, ni dans les diffĂ©rentes conditions ; l’esprit tout seul ne la fait pas deviner il fait qu’on la suit par imitation, et que l’on s’y perfectionne. Il y a des tempĂ©raments qui ne sont susceptibles que de la politesse ; et il y en a d’autres qui ne servent qu’aux grands talents, ou Ă  une vertu solide. Il est vrai que les maniĂšres polies donnent cours au mĂ©rite, et le rendent agrĂ©able ; et qu’il faut avoir de bien Ă©minentes qualitĂ©s pour se soutenir sans la politesse.I Il me semble que l’esprit de politesse est une certaine attention Ă  faire que par nos paroles et par nos maniĂšres les autres soient contents de nous et d’ C’est une faute contre la politesse que de louer immodĂ©rĂ©ment, en prĂ©sence de ceux que vous faites chanter ou toucher un instrument, quelque autre personne qui a ces mĂȘmes talents ; comme devant ceux qui vous lisent leurs vers, un autre Dans les repas ou les fĂȘtes que l’on donne aux autres, dans les prĂ©sents qu’on leur fait, et dans tous les plaisirs qu’on leur procure, il y a faire bien, et faire selon leur goĂ»t le dernier est Il y aurait une espĂšce de fĂ©rocitĂ© Ă  rejeter indiffĂ©remment toute sorte de louanges l’on doit ĂȘtre sensible Ă  celles qui nous viennent des gens de bien, qui louent en nous sincĂšrement des choses Un homme d’esprit, et qui est nĂ© fier, ne perd rien de sa fiertĂ© et de sa raideur pour se trouver pauvre ; si quelque chose au contraire doit amollir son humeur, le rendre plus doux et plus sociable, c’est un peu de Ne pouvoir supporter tous les mauvais caractĂšres dont le monde est plein n’est pas un fort bon caractĂšre il faut dans le commerce des piĂšces d’or et de la Vivre avec des gens qui sont brouillĂ©s, et dont il faut Ă©couter de part et d’autre les plaintes rĂ©ciproques, c’est, pour ainsi dire, ne pas sortir de l’audience, et entendre du matin au soir plaider et parler L’on sait des gens qui avaient coulĂ© leurs jours dans une union Ă©troite leurs biens Ă©taient en commun, ils n’avaient qu’une mĂȘme demeure, ils ne se perdaient pas de vue. Ils se sont aperçus Ă  plus de quatre-vingts ans qu’ils devaient se quitter l’un l’autre et finir leur sociĂ©tĂ© ; ils n’avaient plus qu’un jour Ă  vivre, et ils n’ont osĂ© entreprendre de le passer ensemble ; ils se sont dĂ©pĂȘchĂ©s de rompre avant que de mourir ; ils n’avaient de fonds pour la complaisance que jusque-lĂ . Ils ont trop vĂ©cu pour le bon exemple un moment plus tĂŽt ils mouraient sociables, et laissaient aprĂšs eux un rare modĂšle de la persĂ©vĂ©rance dans l’ L’intĂ©rieur des familles est souvent troublĂ© par les dĂ©fiances, par les jalousies et par l’antipathie, pendant que des dehors contents, paisibles et enjouĂ©s nous trompent, et nous y font supposer une paix qui n’y est point il y en a peu qui gagnent Ă  ĂȘtre approfondies. Cette visite que vous rendez vient de suspendre une querelle domestique, qui n’attend que votre retraite pour Dans la sociĂ©tĂ©, c’est la raison qui plie la premiĂšre. Les plus sages sont souvent menĂ©s par le plus fou et le plus bizarre l’on Ă©tudie son faible, son humeur, ses caprices, l’on s’y accommode ; l’on Ă©vite de le heurter, tout le monde lui cĂšde ; la moindre sĂ©rĂ©nitĂ© qui paraĂźt sur son visage lui attire des Ă©loges on lui tient compte de n’ĂȘtre pas toujours insupportable. Il est craint, mĂ©nagĂ©, obĂ©i, quelquefois Il n’y a que ceux qui ont eu de vieux collatĂ©raux, ou qui en ont encore, et dont il s’agit d’hĂ©riter, qui puissent dire ce qu’il en ClĂ©ante est un trĂšs honnĂȘte homme ; il s’est choisi une femme qui est la meilleure personne du monde et la plus raisonnable chacun, de sa part, fait tout le plaisir et tout l’agrĂ©ment des sociĂ©tĂ©s oĂč il se trouve ; l’on ne peut voir ailleurs plus de probitĂ©, plus de politesse. Ils se quittent demain, et l’acte de leur sĂ©paration est tout dressĂ© chez le notaire. Il y a, sans mentir, de certains mĂ©rites qui ne sont point faits pour ĂȘtre ensemble, de certaines vertus L’on peut compter sĂ»rement sur la dot, le douaire et les conventions, mais faiblement sur les nourritures ; elles dĂ©pendent d’une union fragile de la belle-mĂšre et de la bru, et qui pĂ©rit souvent dans l’annĂ©e du Un beau-pĂšre aime son gendre, aime sa bru. Une belle-mĂšre aime son gendre, n’aime point sa bru. Tout est Ce qu’une marĂątre aime le moins de tout ce qui est au monde, ce sont les enfants de son mari plus elle est folle de son mari, plus elle est marĂątres font dĂ©serter les villes et les bourgades, et ne peuplent pas moins la terre de mendiants, de vagabonds, de domestiques et d’esclaves, que la G
 et H
 sont voisins de campagne, et leurs terres sont contiguĂ«s ; ils habitent une contrĂ©e dĂ©serte et solitaire. EloignĂ©s des villes et de tout commerce, il semblait que la fuite d’une entiĂšre solitude ou l’amour de la sociĂ©tĂ© eĂ»t dĂ» les assujettir Ă  une liaison rĂ©ciproque ; il est cependant difficile d’exprimer la bagatelle qui les a fait rompre, qui les rend implacables l’un pour l’autre, et qui perpĂ©tuera leurs haines dans leurs descendants. Jamais des parents, et mĂȘme des frĂšres, ne se sont brouillĂ©s pour une moindre suppose qu’il n’y ait que deux hommes sur la terre, qui la possĂšdent seuls, et qui la partagent toute entre eux deux je suis persuadĂ© qu’il leur naĂźtra bientĂŽt quelque sujet de rupture, quand ce ne serait que pour les Il est souvent plus court et plus utile de cadrer aux autres que de faire que les autres s’ajustent Ă  J’approche d’une petite ville, et je suis dĂ©jĂ  sur une hauteur d’oĂč je la dĂ©couvre. Elle est situĂ©e Ă  mi-cĂŽte ; une riviĂšre baigne ses murs, et coule ensuite dans une belle prairie ; elle a une forĂȘt Ă©paisse qui la couvre des vents froids et de l’aquilon. Je la vois dans un jour si favorable, que je compte ses tours et ses clochers ; elle me paraĂźt peinte sur le penchant de la colline. Je me rĂ©crie, et je dis "Quel plaisir de vivre sous un si beau ciel et dans ce sĂ©jour si dĂ©licieux ! " Je descends dans la ville, oĂč je n’ai pas couchĂ© deux nuits, que je ressemble Ă  ceux qui l’habitent j’en veux Il y a une chose que l’on n’a point vue sous le ciel et que selon toutes les apparences on ne verra jamais c’est une petite ville qui n’est divisĂ©e en aucuns partis ; oĂč les familles sont unies, et oĂč les cousins se voient avec confiance ; oĂč un mariage n’engendre point une guerre civile ; oĂč la querelle des rangs ne se rĂ©veille pas Ă  tous moments par l’offrande, l’encens et le pain bĂ©nit, par les processions et par les obsĂšques ; d’oĂč l’on a banni les caquets, le mensonge et la mĂ©disance ; oĂč l’on voit parler ensemble le bailli et le prĂ©sident, les Ă©lus et les assesseurs ; oĂč le doyen vit bien avec ses chanoines ; oĂč les chanoines ne dĂ©daignent pas les chapelains, et oĂč ceux-ci souffrent les Les provinciaux et les sots sont toujours prĂȘts Ă  se fĂącher, et Ă  croire qu’on se moque d’eux ou qu’on les mĂ©prise il ne faut jamais hasarder la plaisanterie, mĂȘme la plus douce et la plus permise, qu’avec des gens polis, ou qui ont de l’ On ne prime point avec les grands, ils se dĂ©fendent par leur grandeur ; ni avec les petits, ils vous repoussent par le qui Tout ce qui est mĂ©rite se sent, se discerne, se devine rĂ©ciproquement si l’on voulait ĂȘtre estimĂ©, il faudrait vivre avec des personnes Celui qui est d’une Ă©minence au-dessus des autres qui le met Ă  couvert de la repartie, ne doit jamais faire une raillerie Il y a de petits dĂ©fauts que l’on abandonne volontiers Ă  la censure, et dont nous ne haĂŻssons pas Ă  ĂȘtre raillĂ©s ce sont de pareils dĂ©fauts que nous devons choisir pour railler les Rire des gens d’esprit, c’est le privilĂšge des sots ils sont dans le monde ce que les fous sont Ă  la cour, je veux dire sans La moquerie est souvent indigence d’ Vous le croyez votre dupe s’il feint de l’ĂȘtre, qui est plus dupe de lui ou de vous ?59IV Si vous observez avec soin qui sont les gens qui ne peuvent louer, qui blĂąment toujours, qui ne sont contents de personne, vous reconnaĂźtrez que ce sont ceux mĂȘmes dont personne n’est Le dĂ©dain et le rengorgement dans la sociĂ©tĂ© attire prĂ©cisĂ©ment le contraire de ce que l’on cherche, si c’est Ă  se faire Le plaisir de la sociĂ©tĂ© entre les amis se cultive par une ressemblance de goĂ»t sur ce qui regarde les mƓurs, et par quelques diffĂ©rences d’opinions sur les sciences par lĂ  ou l’on s’affermit dans ses sentiments, ou l’on s’exerce et l’on s’instruit par la L’on ne peut aller loin dans l’amitiĂ©, si l’on n’est pas disposĂ© Ă  se pardonner les uns aux autres les petits Combien de belles et inutiles raisons Ă  Ă©taler Ă  celui qui est dans une grande adversitĂ©, pour essayer de le rendre tranquille ! Les choses de dehors, qu’on appelle les Ă©vĂ©nements, sont quelquefois plus fortes que la raison et que la nature. "Mangez, dormez, ne vous laissez point mourir de chagrin, songez Ă  vivre" harangues froides, et qui rĂ©duisent Ă  l’impossible. "EtĂȘs-vous raisonnable de vous tant inquiĂ©ter ? " n’est-ce pas dire "Etes-vous fou d’ĂȘtre malheureux ? "64I Le conseil, si nĂ©cessaire pour les affaires, est quelquefois dans la sociĂ©tĂ© nuisible Ă  qui le donne, et inutile Ă  celui Ă  qui il est donnĂ©. Sur les mƓurs, vous faites remarquer des dĂ©fauts ou que l’on n’avoue pas, ou que l’on estime des vertus ; sur les ouvrages, vous rayez les endroits qui paraissent admirables Ă  leur auteur, oĂč il se complaĂźt davantage, oĂč il croit s’ĂȘtre surpassĂ© lui-mĂȘme. Vous perdez ainsi la confiance de vos amis, sans les avoir rendus ni meilleurs ni plus L’on a vu, il n’y a pas longtemps, un cercle de personnes des deux sexes, liĂ©es ensemble par la conversation et par un commerce d’esprit. Ils laissaient au vulgaire l’art de parler d’une maniĂšre intelligible ; une chose dite entre eux peu clairement en entraĂźnait une autre encore plus obscure, sur laquelle on enchĂ©rissait par de vraies Ă©nigmes, toujours suivies de longs applaudissements par tout ce qu’ils appelaient dĂ©licatesse, sentiments, tour et finesse d’expression, ils Ă©taient enfin parvenus Ă  n’ĂȘtre plus entendus et Ă  ne s’entendre pas eux-mĂȘmes. Il ne fallait, pour fournir Ă  ces entretiens, ni bon sens, ni jugement, ni mĂ©moire, ni la moindre capacitĂ© il fallait de l’esprit, non pas du meilleur, mais de celui qui est faux, et oĂč l’imagination a trop de Je le sais, ThĂ©obalde, vous ĂȘtes vieilli ; mais voudriez-vous que je crusse que vous ĂȘtes baissĂ©, que vous n’ĂȘtes plus poĂšte ni bel esprit, que vous ĂȘtes prĂ©sentement aussi mauvais juge de tout genre d’ouvrage que mĂ©chant auteur, que vous n’avez plus rien de naĂŻf et de dĂ©licat dans la conversation ? Votre air libre et prĂ©somptueux me rassure, et me persuade tout le contraire. Vous ĂȘtes donc aujourd’hui tout ce que vous fĂ»tes jamais, et peut-ĂȘtre meilleur ; car si Ă  votre Ăąge vous ĂȘtes si vif et si impĂ©tueux, quel nom, ThĂ©obalde, fallait-il vous donner dans votre jeunesse, et lorsque vous Ă©tiez la coqueluche ou l’entĂȘtement de certaines femmes qui ne juraient que par vous et sur votre parole, qui disaient Cela est dĂ©licieux ; qu’a-t-il dit ?67I L’on parle impĂ©tueusement dans les entretiens, souvent par vanitĂ© ou par humeur, rarement avec assez d’attention tout occupĂ© du dĂ©sir de rĂ©pondre Ă  ce qu’on n’écoute point, l’on suit ses idĂ©es, et on les explique sans le moindre Ă©gard pour les raisonnements d’autrui ; l’on est bien Ă©loignĂ© de trouver ensemble la vĂ©ritĂ©, l’on n’est pas encore convenu de celle que l’on cherche. Qui pourrait Ă©couter ces sortes de conversations et les Ă©crire, ferait voir quelquefois de bonnes choses qui n’ont nulle Il a rĂ©gnĂ© pendant quelque temps une sorte de conversation fade et puĂ©rile, qui roulait toute sur des questions frivoles qui avaient relation au cƓur et Ă  ce qu’on appelle passion ou tendresse. La lecture de quelques romans les avait introduites parmi les plus honnĂȘtes gens de la ville et de la cour ; ils s’en sont dĂ©faits, et la bourgeoisie les a reçues avec les pointes et les Quelques femmes de la ville ont la dĂ©licatesse de ne pas savoir ou de n’oser dire le nom des rues, des places, et de quelques endroits publics, qu’elles ne croient pas assez nobles pour ĂȘtre connus. Elles disent le Louvre, la place Royale, mais elles usent de tours et de phrases plutĂŽt que de prononcer de certains noms ; et s’ils leur Ă©chappent, c’est du moins avec quelque altĂ©ration du mot, et aprĂšs quelques façons qui les rassurent en cela moins naturelles que les femmes de la cour, qui ayant besoin dans le discours des Halles, du ChĂątelet, ou de choses semblables, disent les Halles, le Si l’on feint quelquefois de ne se pas souvenir de certains noms que l’on croit obscurs, et si l’on affecte de les corrompre en les prononçant, c’est par la bonne opinion qu’on a du L’on dit par belle humeur, et dans la libertĂ© de la conversation, de ces choses froides, qu’à la vĂ©ritĂ© l’on donne pour telles, et que l’on ne trouve bonnes que parce qu’elles sont extrĂȘmement mauvaises. Cette maniĂšre basse de plaisanter a passĂ© du peuple, Ă  qui elle appartient, jusque dans une grande partie de la jeunesse de la cour, qu’elle a dĂ©jĂ  infectĂ©e. Il est vrai qu’il y entre trop de fadeur et de grossiĂšretĂ© pour devoir craindre qu’elle s’étende plus loin, et qu’elle fasse de plus grands progrĂšs dans un pays qui est le centre du bon goĂ»t et de la politesse. L’on doit cependant en inspirer le dĂ©goĂ»t Ă  ceux qui la pratiquent ; car bien que ce ne soit jamais sĂ©rieusement, elle ne laisse pas de tenir la place, dans leur esprit et dans le commerce ordinaire, de quelque chose de Entre dire de mauvais choses, ou en dire de bonnes que tout le monde sait et les donner pour nouvelles, je n’ai pas Ă  "Lucain a dit une jolie chose
 Il y a un beau mot de Claudien
 Il y a cet endroit de SĂ©nĂšque" et lĂ -dessus une longue suite de latin, que l’on cite souvent devant des gens qui ne l’entendent pas, et qui feignent de l’entendre. Le secret serait d’avoir un grand sens et bien de l’esprit ; car ou l’on se passerait des anciens, ou aprĂšs les avoir lus avec soin, l’on saurait encore choisir les meilleurs, et les citer Ă  Hermagoras ne sait pas qui est roi de Hongrie ; il s’étonne de n’entendre faire aucune mention du roi de BohĂȘme ; ne lui parlez pas des guerres de Flandre et de Hollande, dispensez-le du moins de vous rĂ©pondre il confond les temps, il ignore quand elles ont commencĂ©, quand elles ont fini ; combats, siĂšges, tout lui est nouveau ; mais il est instruit de la guerre des gĂ©ants, il en raconte le progrĂšs et les moindres dĂ©tails, rien ne lui est Ă©chappĂ© ; il dĂ©brouille de mĂȘme l’horrible chaos des deux empires, le Babylonien et l’Assyrien ; il connaĂźt Ă  fond les Egyptiens et leurs dynasties. Il n’a jamais vu Versailles, il ne le verra point il a presque vu la tour de Babel, il en compte les degrĂ©s, il sait combien d’architectes ont prĂ©sidĂ© Ă  cet ouvrage, il sait le nom des architectes. Dirai-je qu’il croit Henri IV fils de Henri III ? Il nĂ©glige du moins de rien connaĂźtre aux maisons de France, d’Autriche et de BaviĂšre "Quelles minuties ! " dit-il, pendant qu’il rĂ©cite de mĂ©moire toute une liste des rois des MĂšdes ou de Babylone, et que les noms d’Apronal, d’HĂ©rigebal, de Noesnemordach, de Mardokempad, lui sont aussi familiers qu’à nous ceux de Valois et de Bourbon. Il demande si l’Empereur a jamais Ă©tĂ© mariĂ© ; mais personne ne lui apprendra que Ninus a eu deux femmes. On lui dit que le Roi jouit d’une santĂ© parfaite ; et il se souvient que Thetmosis, un roi d’Égypte, Ă©tait valĂ©tudinaire, et qu’il tenait cette complexion de son aĂŻeul Alipharmutosis. Que ne sait-il point ? Quelle chose lui est cachĂ©e de la vĂ©nĂ©rable antiquitĂ© ? Il vous dira que SĂ©miramis, ou, selon quelques-uns, SĂ©rimaris, parlait comme son fils Ninyas, qu’on ne les distinguait pas Ă  la parole si c’était parce que la mĂšre avait une voix mĂąle comme son fils, ou le fils une voix effĂ©minĂ©e comme sa mĂšre, qu’il n’ose pas le dĂ©cider. Il vous rĂ©vĂ©lera que Nembrot Ă©tait gaucher, et SĂ©sostris ambidextre ; que c’est une erreur de s’imaginer qu’un Artaxerxe ait Ă©tĂ© appelĂ© Longuemain parce que les bras lui tombaient jusqu’aux genoux, et non Ă  cause qu’il avait une main plus longue que l’autre ; et il ajoute qu’il y a des auteurs graves qui affirment que c’était la droite, qu’il croit nĂ©anmoins ĂȘtre bien fondĂ© Ă  soutenir que c’est la Ascagne est statuaire, HĂ©gion fondeur, Aeschine foulon, et Cydias bel esprit, c’est sa profession. Il a une enseigne, un atelier, des ouvrages de commande, et des compagnons qui travaillent sous lui il ne vous saurait rendre de plus d’un mois les stances qu’il vous a promises, s’il ne manque de parole Ă  DosithĂ©e, qui l’a engagĂ© Ă  faire une Ă©lĂ©gie ; une idylle est sur le mĂ©tier, c’est pour Crantor, qui le presse, et qui lui laisse espĂ©rer un riche salaire. Prose, vers, que voulez-vous ? Il rĂ©ussit Ă©galement en l’un et en l’autre. Demandez-lui des lettres de consolation, ou sur une absence, il les entreprendra ; prenez-les toutes faites et entrez dans son magasin, il y a Ă  choisir. Il a un ami qui n’a point d’autre fonction sur la terre que de le promettre longtemps Ă  un certain monde, et de le prĂ©senter enfin dans les maisons comme homme rare et d’une exquise conversation ; et lĂ , ainsi que le musicien chante et que le joueur de luth touche son luth devant les personnes Ă  qui il a Ă©tĂ© promis, Cydias, aprĂšs avoir toussĂ©, relevĂ© sa manchette, Ă©tendu la main et ouvert les doigts, dĂ©bite gravement ses pensĂ©es quintessenciĂ©es et ses raisonnements sophistiquĂ©s. DiffĂ©rent de ceux qui convenant de principes, et connaissant la raison ou la vĂ©ritĂ© qui est une, s’arrachent la parole l’un Ă  l’autre pour s’accorder sur leurs sentiments, il n’ouvre la bouche que pour contredire "Il me semble, dit-il gracieusement, que c’est tout le contraire de ce que vous dites" ; ou "Je ne saurais ĂȘtre de votre opinion" ; ou bien "Ç’a Ă©tĂ© autrefois mon entĂȘtement, comme il est le vĂŽtre, mais
 Il y a trois choses, ajoute-t-il, Ă  considĂ©rer
", et il en ajoute une quatriĂšme fade discoureur, qui n’a pas mis plus tĂŽt le pied dans une assemblĂ©e, qu’il cherche quelques femmes auprĂšs de qui il puisse s’insinuer, se parer de son bel esprit ou de sa philosophie, et mettre en Ɠuvre ses rares conceptions ; car soit qu’il parle ou qu’il Ă©crive, il ne doit pas ĂȘtre soupçonnĂ© d’avoir en vue ni le vrai ni le faux, ni le raisonnable ni le ridicule il Ă©vite uniquement de donner dans le sens des autres, et d’ĂȘtre de l’avis de quelqu’un ; aussi attend-il dans un cercle que chacun se soit expliquĂ© sur le sujet qui s’est offert, ou souvent qu’il a amenĂ© lui-mĂȘme, pour dire dogmatiquement des choses toutes nouvelles, mais Ă  son grĂ© dĂ©cisives et sans rĂ©plique. Cydias s’égale Ă  Lucien et Ă  SĂ©nĂšque, se met au-dessus de Platon, de Virgile et de ThĂ©ocrite ; et son flatteur a soin de le confirmer tous les matins dans cette opinion. Uni de goĂ»t et d’intĂ©rĂȘt avec les contempteurs d’HomĂšre, il attend paisiblement que les hommes dĂ©trompĂ©s lui prĂ©fĂšrent les poĂštes modernes il se met en ce cas Ă  la tĂȘte de ces derniers, et il sait Ă  qui il adjuge la seconde place. C’est en un mot un composĂ© du pĂ©dant et du prĂ©cieux, fait pour ĂȘtre admirĂ© de la bourgeoisie et de la province, en qui nĂ©anmoins on n’aperçoit rien de grand que l’opinion qu’il a de C’est la profonde ignorance qui inspire le ton dogmatique. Celui qui ne sait rien croit enseigner aux autres ce qu’il vient d’apprendre lui-mĂȘme ; celui qui sait beaucoup pense Ă  peine que ce qu’il dit puisse ĂȘtre ignorĂ©, et parle plus Les plus grandes choses n’ont besoin que d’ĂȘtre dites simplement elles se gĂątent par l’emphase. Il faut dire noblement les plus petites elles ne se soutiennent que par l’expression, le ton et la Il me semble que l’on dit les choses encore plus finement qu’on ne peut les Il n’y a guĂšre qu’une naissance honnĂȘte, ou qu’une bonne Ă©ducation, qui rendent les hommes capables de Toute confiance est dangereuse si elle n’est entiĂšre il y a peu de conjonctures oĂč il ne faille tout dire ou tout cacher. On a dĂ©jĂ  trop dit de son secret Ă  celui Ă  qui l’on croit devoir en dĂ©rober une Des gens vous promettent le secret, et ils le rĂ©vĂšlent eux-mĂȘmes, et Ă  leur insu ; ils ne remuent pas les lĂšvres, et on les entend ; on lit sur leur front et dans leurs yeux, on voit au travers de leur poitrine, ils sont transparents. D’autres ne disent pas prĂ©cisĂ©ment une chose qui leur a Ă©tĂ© confiĂ©e ; mais ils parlent et agissent de maniĂšre qu’on la dĂ©couvre de soi-mĂȘme. Enfin quelques-uns mĂ©prisent votre secret, de quelque consĂ©quence qu’il puisse ĂȘtre C’est un mystĂšre, un tel m’en a fait part, et m’a dĂ©fendu de le dire ; et ils le disent.VIII Toute rĂ©vĂ©lation d’un secret est la faute de celui qui l’a Nicandre s’entretient avec Elise de la maniĂšre douce et complaisante dont il a vĂ©cu avec sa femme, depuis le jour qu’il en fit le choix jusques Ă  sa mort ; il a dĂ©jĂ  dit qu’il regrette qu’elle ne lui ait pas laissĂ© des enfants, et il le rĂ©pĂšte ; il parle des maisons qu’il a Ă  la ville, et bientĂŽt d’une terre qu’il a Ă  la campagne il calcule le revenu qu’elle lui rapporte, il fait le plan des bĂątiments, en dĂ©crit la situation, exagĂšre la commoditĂ© des appartements, ainsi que la richesse et la propretĂ© des meubles ; il assure qu’il aime la bonne chĂšre, les Ă©quipages ; il se plaint que sa femme n’aimait point assez le jeu et la sociĂ©tĂ©. "Vous ĂȘtes si riche, lui disait l’un de ses amis, que n’achetez-vous cette charge ? pourquoi ne pas faire cette acquisition qui Ă©tendrait votre domaine ? On me croit, ajoute-t-il, plus de bien que je n’en possĂšde." Il n’oublie pas son extraction et ses alliances Monsieur le Surintendant, qui est mon cousin ; Madame la ChanceliĂšre, qui est ma parente ; voilĂ  son style. Il raconte un fait qui prouve le mĂ©contentement qu’il doit avoir de ses plus proches, et de ceux mĂȘme qui sont ses hĂ©ritiers "Ai-je tort ? dit-il Ă  Elise ; ai-je grand sujet de leur vouloir du bien ? " et il l’en fait juge. Il insinue ensuite qu’il a une santĂ© faible et languissante, et il parle de la cave oĂč il doit ĂȘtre enterrĂ©. Il est insinuant, flatteur, officieux Ă  l’égard de tous ceux qu’il trouve auprĂšs de la personne Ă  qui il aspire. Mais Elise n’a pas le courage d’ĂȘtre riche en l’épousant. On annonce, au moment qu’il parle, un cavalier, qui de sa seule prĂ©sence dĂ©monte la batterie de l’homme de ville il se lĂšve dĂ©concertĂ© et chagrin, et va dire ailleurs qu’il veut se Le sage quelquefois Ă©vite le monde, de peur d’ĂȘtre ennuyĂ©. LaBruyĂšre dans la bibliothĂšque de son oncle reconnaĂźt que l’étude des mƓurs et des caractĂšres peut conduire Ă  la sagesse. — Il se livre Ă  l’étude de la philosophie cartĂ©sienne : il y trouve non seulement une mĂ©thode excellente pour arriver Ă  la certitude et fonder la science des mƓurs, mais encore une sociĂ©tĂ© d’amis qui comprennent ses goĂ»ts et qui pourront un jour lui EnrĂ©alitĂ©, Ă  l’égard de MoliĂšre lui-mĂȘme, et non de la tradition dans laquelle tous deux s’inscrivent, La BruyĂšre se montre sĂ©vĂšre et mĂȘme acerbe, multipliant les reproches. Tout d’abord, La BruyĂšre reproche Ă  MoliĂšre son comique verbal, son “jargon” (mĂ©dical ou juridique) et sa tendance au “barbarisme” (I, 38, p. 139).
DE LA SOCIÉTÉ ET DE LA CONVERSATIONG** et H** sont voisins de campagne, et leurs terres sont contiguĂ«s ; ils habitent une contrĂ©e dĂ©serte et solitaire. ÉloignĂ©s des villes et de tout commerce, il semblait que la fuite d'une entiĂšre solitude ou l'amour de la sociĂ©tĂ© eĂ»t dĂ» les assujettir Ă  une liaison rĂ©ciproque ; il est cependant difficile d'exprimer la bagatelle qui les a fait rompre, qui les rend implacables l'un pour l'autre, et qui perpĂ©tuera leurs haines dans leurs descendants. Jamais des parents, et mĂȘme des frĂšres, ne se sont brouillĂ©s pour une moindre suppose qu'il n'y ait que deux hommes sur la terre, qui la possĂšdent seuls, et qui la partagent toute entre eux deux je suis persuadĂ© qu'il leur naĂźtra bientĂŽt quelque sujet de rupture, quand ce ne serait que pour les est souvent plus court et plus utile de cadrer aux autres que de faire que les autres s'ajustent Ă  nous. ÉD. 7.49J'approche d'une petite ville, et je suis dĂ©jĂ  sur une hauteur d'oĂč je la dĂ©couvre. Elle est situĂ©e Ă  mi-cĂŽte ; une riviĂšre baigne ses murs, et coule ensuite dans une belle prairie ; elle a une forĂȘt Ă©paisse qui la couvre des vents froids et de l'aquilon. Je la vois dans un jour si favorable, que je compte ses tours et ses clochers ; elle me paraĂźt peinte sur le penchant de la colline. Je me rĂ©crie, et je dis Quel plaisir de vivre sous un si beau ciel et dans ce sĂ©jour si dĂ©licieux ! » Je descends dans la ville, oĂč, je n'ai pas couchĂ© deux nuits, que je ressemble Ă  ceux qui l'habitent j'en veux sortir. ÉD. 5.50Il y a une chose que l'on n'a point vue sous le ciel, et que selon toutes les apparences on ne verra jamais c'est une petite ville qui n'est divisĂ©e en aucuns partis ; oĂč les familles sont unies, et oĂč les cousins se voient avec confiance ; oĂč un mariage n'engendre point une guerre civile ; oĂč la querelle des rangs ne se rĂ©veille pas Ă  tous moments par l'offrande, l'encens et le pain bĂ©nit, par les processions et par les obsĂšques ; d'oĂč l'on a banni les caquets, le mensonge et la mĂ©disance ; oĂč l'on voit parler ensemble le bailli et le prĂ©sident, les Ă©lus et les assesseurs ; oĂč le doyen vit bien avec des chanoines ; oĂč les chanoines ne dĂ©daignent pas les chapelains, et oĂč ceux-ci souffrent les chantres. ÉD. 4.51Les provinciaux et les sots sont toujours prĂȘts Ă  se fĂącher, et Ă  croire qu'on se moque d'eux ou qu'on les mĂ©prise il ne faut jamais hasarder la plaisanterie, mĂȘme la plus douce et la plus permise, qu'avec des gens polis, ou qui ont de l'esprit. ÉD. 4.52On ne prime point avec les grands, ils se dĂ©fendent par leur grandeur ; ni avec les petits, ils vous repoussent par le qui vive. ÉD. 5.53Tout ce qui est mĂ©rite se sent, se discerne, se devine rĂ©ciproquement si l'on voulait ĂȘtre estimĂ©, il faudrait vivre avec des personnes estimables. ÉD. 5.54Celui qui est d'une Ă©minence au-dessus des autres qui le met Ă  couvert de la repartie, ne doit jamais faire une raillerie y a de petits dĂ©fauts que l'on abandonne volontiers Ă  la censure, et dont nous ne haĂŻssons pas Ă  ĂȘtre raillĂ©s ce sont de pareils dĂ©fauts que nous devons choisir pour railler les des gens d'esprit, c'est le privilĂšge des sots ils sont dans le monde ce que les fous sont Ă  la cour, je veux dire sans consĂ©quence. ÉD. 4.57La moquerie est souvent indigence d' le croyez votre dupe s'il feint de l'ĂȘtre, qui est plus dupe de lui ou de vous ?59Si vous observez avec soin qui sont les gens qui ne peuvent louer, qui blĂąment toujours, qui ne sont contents de personne, vous reconnaĂźtrez que ce sont ceux mĂȘmes dont personne n'est content. ÉD. 4.60
DenisPodalydĂšs lit des extraits des "CaractĂšres" de Jean la BruyĂšre, publiĂ©s en 1688, mais en rĂ©alitĂ© peut-ĂȘtre plus que jamais d'actualitĂ©. "L’on voit des
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Lafiche technique pour Les CaractĂšres La BruyĂšre. 👉 Maintenant que les prĂ©sentations sont faites entre Mr de la BruyĂšre et toi et que tu connais mieux le contexte dans lequel s’inscrit Les CaractĂšres, il est temps de se plonger parmi les 740 pages de ce recueil !. Difficile de rĂ©sumer un tel ouvrage en raison des 16 livres qu’il comprend.

Informations Juridiques de EARL DE LA BRUYERE SIREN 428 840 227 SIRET siĂšge 428 840 227 00022 Forme juridique Exploitation agricole Ă  responsabilitĂ© limitĂ©e TVA intracommunautaire FR90428840227 NumĂ©ro RCS 428 840 227 Macon Capital social 314 800,00 € Inscription au RCS INSCRIT au greffe de MACON, le 20/01/2000 TÉLÉCHARGER L'EXTRAIT INPI ActivitĂ© de la sociĂ©tĂ© EARL DE LA BRUYERE ActivitĂ© principale dĂ©clarĂ©e ELEVAGE BOVIN ET CAPRIN Code NAF ou APE Élevage d'autres bovins et de buffles Domaine d’activitĂ© Culture et production animale, chasse et services annexes Comment contacter EARL DE LA BRUYERE ? TĂ©lĂ©phone Non disponible Email Non disponible Site internet Non disponible Adresse complĂšte LA BRUYERE 71160 RIGNY-SUR-ARROUX Finances de EARL DE LA BRUYERE Dirigeants et reprĂ©sentants de EARL DE LA BRUYERE GĂ©rant Sylvain TILLIER 48 ans - 15/04/1974 Occupe ce poste depuis le 09/12/2013 Établissements de l'entreprise EARL DE LA BRUYERE SiĂšge SIRET 428 840 227 00022 Créé le 31/10/2013 LA BRUYERE 71160 RIGNY-SUR-ARROUX MĂȘme activitĂ© que l'entreprise En activitĂ© SIRET 428 840 227 00014 Créé le 01/01/2000 LA VIGNE RTE DE RIGNY 71130 GUEUGNON MĂȘme activitĂ© que l'entreprise FermĂ© depuis le 31/10/2013 et transfĂ©rĂ© vers un autre Ă©tablissement Convention collective de EARL DE LA BRUYERE Aucune convention connue pour cette entreprise. Annonces BODACC de EARL DE LA BRUYERE PROCÉDURE COLLECTIVE 28/07/2019 RCS de MĂącon Famille Jugement d'ouverture Nature Jugement d'extension d'une procĂ©dure de redressement judiciaire ComplĂ©ment de jugement Jugement d'extension d'une procĂ©dure de redressement judiciaire de M TILLIER Sylvain son gĂ©rant. Mandataire judiciaire SCP BTSG2, 22 quai Gambetta, 71100 Chalon-sur-SaĂŽne. Les dĂ©clarations de crĂ©ances sont Ă  dĂ©poser dans un dĂ©lai de deux mois suivant la prĂ©sente publication auprĂšs du mandataire judiciaire. RG 19/00029 DĂ©nomination EXPLOITATION AGRICOLE A RESPONSABILITE LIMITEE DE LA BRUYERE Capital 314 800,00 € Adresse La BruyĂšre 71160 Rigny-sur-Arroux ActivitĂ© ELEVAGE BOVIN ET CAPRIN Administration GĂ©rant TILLIER Sylvain nom d'usage TILLIER. Documents juridiques de EARL DE LA BRUYERE - ProcĂšs-verbal d'assemblĂ©e gĂ©nĂ©rale mixte Transformation GAEC en EARL Modification de la dĂ©nomination de la personne morale Modification relative aux dirigeants d'une sociĂ©tĂ© de personnes Cession de parts Transfert siĂšge social et Ă©tablissement principal - Statuts mis Ă  jour Transformation GAEC en EARL Modification de la dĂ©nomination de la personne morale Modification relative aux dirigeants d'une sociĂ©tĂ© de personnes Cession de parts Transfert siĂšge social et Ă©tablissement principal 09/12/2013 - ProcĂšs-verbal d'assemblĂ©e gĂ©nĂ©rale extraordinaire Modification relative aux dirigeants d'une sociĂ©tĂ© de personnes Cession de parts - Statuts mis Ă  jour Modification relative aux dirigeants d'une sociĂ©tĂ© de personnes Cession de parts 04/01/2011 - Statuts constitutifs Divers 07/01/2000 Comptes annuels de EARL DE LA BRUYERE Aucun compte n'est disponible pour cette entreprise. Actionnaires et bĂ©nĂ©ficiaires effectifs de EARL DE LA BRUYERE depuis le 29/05/2018 85,49 % des parts et des votes
. 282 305 392 273 471 441 240 423

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